Compte-rendu de l’audience au ministère de l’enseignement professionnel
14 février 2001
Le 14.02.2001, une délégation de l’UNSEN-CGT (Denis Baudequin, Micheline Davesne, Alain Gautheron) a rencontré Jean-Luc Mélenchon et plusieurs membres de son cabinet, pendant près de 3 heures.
UNSEN-CGT
Nous avons tenu à rappeler que cette audience se tenait dans un moment où l’insatisfaction des personnels grandit.
Alors que ceux-ci sont préoccupés par l’évolution de leur salaire, l’avenir de leur retraite, la réduction du temps de travail, et plus globalement par leurs conditions de travail et d’emploi, leurs interlocuteurs sont muets ou leurs réponses ne correspondent ni au sens, ni à la hauteur de leurs attentes.
Sans vouloir généraliser le climat et les actes de violence auxquels sont confrontés nos collègues dans un nombre important d’établissements, mais sans vouloir ni les occulter, ni les minimiser, ils entraînent, dans un nombre grandissant de collèges et de lycées, des conflits larvés et persistants qui minent les conditions de vie et de travail des adultes et des jeunes.
Face à leur désarroi et à des situations pour lesquelles, dans un certain nombre de cas, les personnels pourraient légitimement invoquer un " droit de retrait ", les ministères et les rectorats sous-estiment ce qu’ils vivent et ne proposent -toujours d’ailleurs sous la pression des luttes- que des mesures et des moyens dérisoires.
C’est le même contexte que connaissent les personnels de l’enseignement professionnel, exacerbé par les inquiétudes qu’ils peuvent ressentir face aux conditions de préparation de la prochaine rentrée scolaire.
Dans de nombreuses académies, les projets de carte scolaire, par le biais de fermetures de sections ou de regroupements, non seulement pérennisent les baisses d’effectifs constatées lors des rentrées précédentes, mais en anticipent de nouvelles. Ils remettent ainsi en cause les capacités d’accueil et la diversité de l’offre de formation.
Sans revenir sur le fond de chacun des dossiers qui ont fait l’objet de la concertation entreprise depuis septembre, et auxquels cette audience est plus particulièrement consacrée, nous avons le sentiment général qu’elle n’a pas vraiment débouché.
Là aussi, les fortes attentes exprimées par les personnels des lycées professionnels, SEGPA et EREA vont être déçus.
Ministère
Se proposant de revenir ultérieurement sur les sujets que nous avons évoqués, notamment sur les questions de violence, ce qui, compte tenu du temps, n’a pas été possible, et avant que nous abordions les différents points, objets des négociations menées depuis plusieurs mois, Jean-Luc Mélenchon tient à nous réaffirmer que les situations décrites dans plusieurs rectorats (Dijon, Orléans, Versailles, Toulouse) ne correspondent pas aux orientations données et qui sont de tout faire pour inverser la tendance en matière de recrutement élèves.
Pour lui et les membres de son cabinet, il s’agit seulement de premières hypothèses qui demandent à être revues. Etant entendu que la carte scolaire est en négociation jusqu’en mars, 5 réunions inter-académiques sont prévues d’ici là.
Néanmoins, un contact particulier va être établi avec les académies signalées.
RENOVATION du CAP
Ministère
Jean-Luc Mélenchon réaffirme son intention de voir le CAP reconnu comme le premier diplôme de qualification professionnelle.
Il dit partager notre conception d’une filière professionnelle non considérée comme une voie de remédiation.
Pour lui, le système scolaire de notre pays souffre de la conception d’une voie générale considérée comme la " voie royale ". C’est l’échec de cette conception qui porte en elle l’importance de l’échec scolaire.
Il souhaiterait que le concept de professionnalisation de la formation traverse tout le système éducatif.
Tous les référentiels de ces CAP, qui comporteront des PFE (14 semaines au minimum pour une préparation en 2 ans, 20 semaines pour une préparation en 3 ans) seront revus. Il se feront en 2 ou 3 ans selon les besoins. La 3ème année n’étant pas construite à l’identique de la 2ème mais en prenant en compte les acquis antérieurs de l’élève, ce qui sera rendu possible par les modules (le référentiel de certification étant organisé en unités constitutives du diplôme). Des possibilités de passerelles seront proposées, en particulier la montée au niveau IV ou par préparation du BEP en une année.
Sa mise en place est prévue à la rentrée 2002. Le PPCP est prévu dans toutes les formes de préparation au CAP (sous statut scolaire, apprentissage et formation continue).
Le CCF est étendu à l’ensemble des disciplines.
UNSEN-CGT
Nous avons toujours les mêmes interrogations sur la nature et l’intérêt de cette " relance " du CAP que nous estimons déconnectée de contenus de formation susceptibles d’assurer un réel débouché sur l’emploi.
Cela nous amène à nous demander sur quels recrutements post 3ème ils seront basés, notamment lorsqu’il y aura un BEP dans la même spécialité.
Nous serons d’autant plus attentifs que le contexte dans lequel s’opère cette restructuration n’est pas sans nous inquiéter.
Ici et là, devant les graves difficultés que rencontrent un certain nombre de jeunes (et/ou que l’école rencontre face à eux) revient l’idée que l’enseignement professionnel serait un moyen de remédier à celles-ci.
Or, nous sommes convaincus que la formation professionnelle ne peut être, par elle-même, le remède miracle à " administrer " aux jeunes en grande difficulté, sous peine de voir cette voie redevenir un filière de relégation.
Pour ces jeunes, d’autres réponses sont à construire touchant à l’organisation du système éducatif, notamment en redéfinissant le rôle et la place du collège.
Nous considérons comme une bonne chose le fait que la formation puisse se réaliser sur 2 ou 3 ans et permettre ainsi de prendre en compte, dans la troisième année, les acquis antérieurs du jeune. Par contre, nous rappelons que nous récusons toute certification modulaire qui consisterait à valider des " morceaux " de diplômes et à faire reconnaître professionnellement ces " bouts " de qualification à l’image de ce que fait le patronat avec les CQP (certificats de qualification professionnelle). C’est un moyen que celui-ci utilise pour dévaloriser les diplômes, et ainsi déqualifier et sous-payer les salariés.
Enfin, nous rappelons que nous sommes opposés à toute extension, voire au maintien du CCF avant que soit menée une véritable évaluation. Il y a besoin, et cela nous semblait être acquis, de tirer un réel bilan de ce mode d’évaluation et de demander l’avis de nos collègues. Jean-Luc Mélenchon s’engage à faire procéder à cette évaluation.
LES GRILLES HORAIRES
Ministère
Pour le ministre, le nouveau statut des PLP, adopté lors de la réunion du CTPM du 13 avril 2000, n’offre plus les souplesses d’une annualisation de leur service. Cela a entraîné des difficultés organisationnelles lourdes à la rentrée 2000 pour la réalisation des emplois du temps élèves et professeurs. Des dérives ont provoqué de fortes tensions.
Pour éviter les dérives, l’horaire hebdomadaire indicatif est le résultat exact de la division de l’horaire annuel par le nombre de semaines de présence dans l’établissement (soit 67 semaines sur les 2 années du cycle déduction faite des périodes de PFE).
Cela est obtenu en préaffectant une partie de l’horaire de PPCP à une ou deux disciplines générales (partie prélevée sur les 50 % de l’horaire PPCP réservé aux disciplines générales), le reste devant être réparti par les équipes pédagogiques en fonction des projets.
Globalement, la lisibilité des grilles horaires en est très sensiblement améliorée ainsi que la faisabilité de leur mise en œuvre sur le terrain.
L’introduction d’un horaire hebdomadaire d’EJCS
Les grilles horaires actuelles affectent à cet enseignement un volume horaire global (30 heures en BEP, 20 heures en baccalauréat professionnel) prélevé sur le volume horaire disciplinaire des enseignants qui accepteraient de le prendre en charge. Une telle disposition risquait de décourager les nombreux enseignants de différentes disciplines (générales et professionnelles) prêts à prendre en charge cet enseignement (ils considèrent que le volume horaire de leurs disciplines en serait trop affecté et qu’ils ne pourraient, dans ces conditions, respecter les programmes). Cela pour ne pas ruiner l’objectif d’introduction de l’ECJS en lycée professionnel.
Un horaire d’1/2 heure élèves est introduit dans toutes les années de formation des cycles BEP et baccalauréat professionnel (à partir du 25ème élève, cet horaire donne droit au doublement de la dotation horaire professeur en BEP).
Les nouvelles grilles prévoient une augmentation des dédoublements horaires pour certaines disciplines.
Principales augmentations proposées :
- Disciplines générales de tous les baccalauréats professionnels et disciplines générales des BEP comptabilité, vente distribution, secrétariat, carrières sanitaires et sociales, hôtellerie restauration et alimentation ;
- Langues vivantes en baccalauréat professionnel ;
- Disciplines professionnelles des baccalauréats professionnels du secteur des services alimentation.
Une mesure complémentaire importante :
La prise en compte de la concertation pour la mise en œuvre du PPCP. L’équivalent d’environ 10 % de l’horaire PPCP sera consacré à la concertation (soit 12 heures en terminale de BEP et 10 heures en 1ère et terminale de baccalauréat professionnel).
UNSEN-CGT
Nous avons du mal à partager l’optimisme de cette présentation.
Pour nous, la concertation a été réduite à de simples aménagements techniques.
Si les grilles sont redevenues hebdomadaires -c’est le point le plus positif- aucun des problèmes que nous posions ne nous semble réglé.
Au-delà de tout ce que nous avons dit sur le PPCP, sur son côté professionnel, sur son caractère obligatoire -acté par le statut des PLP- et donc sur sa généralisation, nous émettons de sérieuses réserves sur la faisabilité de l’ensemble.
L’organisation a été complexifiée et les quelques mesures proposées ne sont pas de nature à simplifier l’élaboration et la mise en œuvre des emplois du temps, pour les enseignants comme pour les élèves. D’autant plus que " nouvelle innovation pédagogique ", le Projet Artistique et Culturel (PAC) fait son apparition et va venir " bouger " un peu plus l’organisation des établissements.
Même conduit sur la base du volontariat et à partir d’un dossier, on peut se demander jusqu’où on veut nous emmener !
Par refus d’abaisser les seuils de manière significative, l’augmentation des dédoublements horaires, même si elle représentera un mieux pour ceux qui en bénéficient, reste très marginale dans son volume et dans le nombre de disciplines concernées. Cela va de + 5,5 heures dédoublées à + 96 heures sur l’ensemble du cycle. En ramenant ce volume au nombre de semaines concernées sur les deux ans, on peut mesurer l’impact réel de ces dédoublements.
Les volumes horaires globaux ont été renforcés (de 10 h à 94 h sur le cycle selon le type de BEP ou de bac pro).
Enfin, la concertation prévue pour l’équipe pédagogique n’implique pas une décharge des élèves. Pendant ce temps, ils seront en " activité " seuls, c’est-à-dire sous la responsabilité des membres de l’équipe pédagogique. C’est ce que l’on peut caractériser comme une mesure obtenue à " bon compte ".
En ce qui concerne les PPCP, Jean-Luc Mélenchon nous a informés qu’il pourra être fait appel au fonds social européen qui a dégagé une enveloppe de 150 millions de francs.
LA PRECARITE
Ministère
En fait, Jean-Luc Mélenchon nous a présenté les différentes mesures se rapportant aux concours réservés et aux examens professionnels qui ont été débattus lors du CTPM du 7 février. Rien de neuf donc, sinon qu’il y aurait, pour les PLP, 1 105 places au concours réservé et 1 020 à l’examen professionnel, soit, en tenant compte de la diminution enregistrée sur les concours internes (qui passent de 700 à 400 places), une augmentation de 765 places sur l’ensemble des 3 voies de titularisation.
Des listes complémentaires seront établies à hauteur de 100 % des listes principales.
Afin, globalement, de ne pas perdre de places :
- le nombre de postes par discipline sera déterminé après connaissance de l’ensemble des inscriptions,
- des ajustements pourront également se faire par glissement d’une discipline à une autre.
UNSEN-CGT
Ce dossier est pour nous impossible à considérer uniquement du seul angle de l’enseignement professionnel. D’une part, parce que la mobilité d’une partie importante des précaires les conduisait d’un type d’établissement à un autre ;
D’autre part parce que nous refusons qu’une catégorie soit victime des redéploiements que les ministères pourraient opérer au regard d’un volume global insuffisant.
Or, aujourd’hui, l’administration recense 38 471 précaires ; on est donc loin du chiffre de 22 000 qui avait été annoncé il y a quelques mois.
Même si nous sommes satisfaits de voir le ministère arrêter des dispositions pour pourvoir tous les postes, nous déplorons toujours le refus d’engagement clair de titulariser l’ensemble des précaires.
Au-delà de ce dispositif, nous posons la question des mesures spécifiques nécessaires pour faire face aux besoins importants de recrutements externes, notamment en développant une politique de pré-recrutement (augmentation et diversification du nombre de cycles préparatoires à mettre en relation avec le nombre de places aux concours, validation des acquis professionnels non réservée aux seules disciplines professionnelles.
Faute des recrutements indispensables, le recours à la précarité se poursuivrait. Enfin, nous serons vigilants à ce qu’il n’y ait pas de mesures restrictives vis-à-vis des possibilités de départ anticipé (CFA) ni sur les dates d’effet de celles-ci dans l’année scolaire. Nous revendiquons qu’elles continuent à se faire à la date à laquelle les conditions sont réunies et non à la fin de l’année scolaire.
Ministère
La gestion prévisionnelle des emplois, qui a été décidée et dont le plan pluriannuel est la traduction, doit permettre de répondre aux besoins de recrutement et d’éviter ainsi une reconstitution de la précarité.
La tendance constatée dans les inscriptions aux différents concours externes, ne diminue pas.
Enfin, sur le CFA, il semble impossible qu’un gouvernement issu de l’actuelle majorité ne reconduise pas cette mesure en 2001/2002. Au-delà de 2002, c’est autre chose !
L’ENSEIGNEMENT ADAPTE
UNSEN-CGT
Pour l’instant, on est resté au plan des constats. L’administration semblant d’ailleurs découvrir -et minimiser- une situation que nous avions dénoncée depuis longtemps.
Au-delà, nous voulons savoir à quel moment sera traité un certain nombre de questions importantes, notamment :
- quel avenir et quelles évolutions pour les SEGPA/EREA ?
- quelles modalités de mise en œuvre des 18 h pour les PLP à la rentrée ?
- quelles perspectives pour que l’ensemble des personnels de SEGPA/EREA soit à 18 h ?
Ministère
Pour les questions 1 et 3, elles sont avant tout du ressort du ministère de l’Education nationale auquel sont transmis régulièrement les échanges qui ont lieu dans la table ronde, le ministère de l’enseignement professionnel ne s’occupant que de la partie formation qualifiante. Pour lui, celle-ci doit être dispensée dans les LP quand il y en a un à proximité, dans les SEGPA quand ce n’est pas le cas.
En ce qui concerne la 2ème question, aucune modalité particulière n’est prévue.
UNSEN-CGT
Les contenus n’ayant pas changé, les dispositifs horaires sont les mêmes. C’est donc en heures supplémentaires que le passage aux 18 heures pour les PLP de SEGPA/EREA se fera. Pour nous, c’est inadmissible !
CHEFS DE TRAVAUX
1) Le ministère est en train de faire un état des lieux précis sur la façon dont ont été ventilés les 300 " postes " de CT. Des consignes strictes seront redonnées cette année afin qu’il n’y ait pas d’implantation inférieure à un demi-poste.
2) Rappelant notre demande d’un groupe de travail sur les chefs de travaux, le cabinet nous a informés que les services réalisaient actuellement un double travail (sur la fonction et sur le réglementaire( ?) et qu’à l’issue de celui-ci, une concertation aurait lieu sur les propositions du ministère.